Honte à la reforme judiciaire De nombreux professionnels de la justice dénoncent le projet de loi actuel qui renforce notament le rôle du procureur. Une réforme est pourtant nécessaire pour assurer davantage de transparence. Mardi, magistrats, personnels judiciaires, personnels pénitentiaires et avocats défilaient main dans la main jusqu’au ministère de la Justice. Tous hurlaient leur opposition au projet de loi présenté par le garde des Sceaux. Nous n’avons jamais pu atteindre la chancellerie, des CRS casqués et armés attendaient aux portes de la place Vendôme : “robe noires contre matraques sanglantes”. Indépendance de la justice, indépendance des procureurs, survie des juges d’instruction étaient leurs slogans. Je ne comprenais rien. Ont-ils la mémoire courte ? Les avocats ont déjà oublié les pouvoirs omnipotents et absolus du juge d’instruction. Outreau et son juge sont-ils tombés dans les oubliettes de l’histoire ? Je le dis, je le signe et persiste, le juge d’instruction reste le symbole décadent de la justice. Mises en examen, interrogatoires, expertises, confrontations, chantage à la liberté. Ces pouvoirs sont exercés sans aucun garde-fou, sans réel contre-pouvoir. Il faudra donc le supprimer. Mais le remplacer par encore plus d’opacité ? Par ce procureur qui prend ses ordres à la chancellerie, qui travaille avec les services de police sans aucun contrôle et surtout pas celui des avocats. Ce nouveau statut est contraire à la Constitution, à la Convention européenne des droits de l’homme, à la séparation des pouvoirs si chère à Montesquieu. Je rêve d’une vraie procédure accusatoire sans juge d’instruction dans laquelle le procureur est un magistrat et non un juge, à égalité avec l’avocat. Je rêve de faire des enquêtes avec les policiers, de faire appel à mes experts, d’avoir le droit d’entendre des témoins. Je rêve juste de pouvoir atteindre la place Vendôme sans être refoulé par des CRS casqués. Je ne suis pas un braqueur de bijouterie de luxe. Je rêve seulement d’un peu de démocratie où “l’opacité grise” du juge d’instruction, vouée selon ce projet de loi à devenir “l’opacité noire”, vire grâce à la magie d’un nouveau projet de loi à la transparence judiciaire. Je suis un avocat debout, je vis pour une justice juste et équitable pour tous. Maître Pierre LUMBROSO