JEAN-PIERRE Bouzaglou ne retrouvera pas de sitôt sa vie en Israël, cette nouvelle vie qu’il s’était construite après avoir fui la France voilà plus de vingt ans. Hier, après deux jours de procès, la cour d’assises des Hauts-de-Seine a condamné cet homme de 52 ans à quinze ans de réclusion criminelle pour le meurtre de son ancienne compagne, le 7 mai 1980, à Bagneux. Nadine avait été abattue de trois balles sous les yeux de ses trois enfants, âgés de 4 ans à 6 ans. Jean-Pierre Bouzaglou, alors décrit comme violent, toxicomane et paranoïaque, ne supportait pas la rupture que lui imposait son amie. La cour d’assises des Hauts-de-Seine l’avait déjà condamné par contumace à la réclusion criminelle à perpétuité en 1983. Mais Jean-Pierre Bouzaglou était alors à des milliers de kilomètres : pour échapper à la justice, il s’était réfugié en Israël. Ses parents, un couple modeste établi à Bagneux, ont organisé l’exode de leur fils quelques mois après le drame. Sur place, dans la maison familiale d’Ashdod, dans la banlieue sud de Tel-Aviv, ils ont fait hospitaliser leur fils alors ingérable dans un établissement psychiatrique. Il avait refait sa vie Après sa sortie, en 1983, Jean-Pierre Bouzaglou trouve un travail et rencontre celle qui allait devenir sa femme, une éducatrice spécialisée pour enfants handicapés. Elle ne sait rien de sa vie en France, rien de sa relation avec Nadine, rien du crime qu’il a commis. Deux ans plus tard, Jean-Pierre Bouzaglou fait la connaissance d’un rabbin traditionaliste. Avec son épouse, il intègre une communauté loubavitch « qui lui édicte des règles de vie extrêmement strictes basées sur l’Ancien Testament » raconte son avocat, M e Pierre Lumbroso. Réveil à l’aube, méditation, prières… « Même s’il a toujours des problèmes psychologiques importants, qu’il est toujours dans une irrationalité importante, il est cadré par la religion », dira aussi M e Lumbroso dans sa plaidoirie. Père de trois enfants – deux garçons et une fille aujourd’hui âgés de 15 ans à 19 ans – Jean-Pierre Bouzaglou a même changé de nom. Il est devenu Moshe Bazak, a adopté la kippa noire et arbore une longue barbe grise qui allonge son visage d’ascète. C’est sous ces traits que les enfants de la victime l’ont redécouvert plus de vingt ans après la disparition de leur mère. Il s’en est fallu de peu pour que l’accusé ne poursuive sa seconde vie sans être inquiété. C’est une modification de la loi israélienne, entrée en application en 2001, qui aura permis son extradition vers la France. Jean-Pierre Bouzaglou a été interpellé de justesse, le 6 avril 2003, soit treize jours avant que la peine de réclusion à perpétuité prononcée contre lui en 1983 ne soit prescrite.